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lundi 26 avril 2010

Boubacar Arou Samba DICKO, deuxième conseiller de Mme Ba Awa KEITA ambassadeur du Mali.

Selon vous, qu’est ce qu’être un diplomate ?

Un diplomate est une personne qui sait défendre les intérêts de son pays et qui veille sur ses ressortissants. Un diplomate doit également travailler pour le développement de la coopération entre son pays d’origine et son pays hôte.

Quel a été votre cursus diplomatique ?

J’ai été recruté en qualité de conseiller des affaires étrangères en 2000. Après le Ministère des Affaires Etrangères de Bamako, je suis ici à mon premier poste hors du Mali depuis janvier 2008.

Que savez-vous de l’histoire des relations diplomatiques entre le Mali et le Sénégal ?

Les relations diplomatiques entre ces deux pays datent de 1963. Malheureusement je ne pourrai vous en dire plus parce que depuis notre déménagement des locaux de la Cathédrale (en ville) nous avons perdu toutes nos archives que nous essayons reconstituer jusqu’à présent. Mais je peux vous assurer que le Sénégal et le Mali ont toujours entretenus de très bonnes relations diplomatiques.

Quel est le rôle de votre institution?

Notre ambassade a pour rôle de développer les relations de coopération entre le Sénégal et le Mali et de protéger les nationaux maliens. La tâche nous est un peu facile sur ce plan parce que les maliens n’ont pas tellement de problèmes ici au Sénégal. Par contre l’ambassade fait face à toute sorte de sollicitation.

Quels genres de sollicitations par exemple ?

Comme exemple, je peux citer le cas des immigrés clandestins qui tentent d’entrer en Europe. Pour les rapatrier, on les fait passer par ici puisque c’est cette ambassade qui couvre le Sénégal, la Gambie, la Guinée Bissau, et le Cap Vert. Et l’ambassade a pour devoir de les ramener au bercail et ceci aux frais de l’Etat malien.

A part les questions diplomatiques, l’ambassade traite-t-elle d’autres problèmes ?

Nous faisons face à tous les problèmes auxquels sont confrontés les ressortissants maliens. Quand ils nous sollicitent, nous devons obligatoirement les assister. Nous traitons aussi des questions consulaires. Par exemple s’il y a de nos ressortissants qui sont à l’intérieur du Sénégal, ou dans l’un des 4 pays que nous couvrons, qui ont des problèmes de déplacement pour venir récupérer ou produire leurs cartes consulaires, l’ambassade fait déplacer un fonctionnaire pour aller leur remettre leurs pièces d’identité. Peu importe la distance à parcourir, l’essentiel c’est de satisfaire les besoins des compatriotes.
S’il y en a aussi qui ont des problèmes à la justice, nous sommes tenus de les suivre et de les orienter jusqu’à la fin de l’affaire, à défaut de trouver des solutions à leurs problèmes. Idem pour ceux qui sont malades et qui n’ont pas assez de moyens financiers pour se soigner. Bref, nous soutenons nos compatriotes dans les limites de nos moyens.

Si un problème dépasse votre domaine de compétence, que faites-vous ?

Nous rendons compte à notre hiérarchie qui est le Ministère des Affaires Etrangères à Bamako. En matière de justice par exemple, si nous ne pouvons pas intervenir, nous nous contentons de suivre l’affaire tout en faisant confiance en la loi du pays intéressé. Nous suivons pour que nos compatriotes soient dans leurs droits. Mais nous ne nous immisçons pas parce qu’il ne faut pas oublier que les ressortissants maliens ne peuvent pas et ne doivent pas déroger à la règle.

En cas de malentendu entre un citoyen malien et un citoyen sénégalais ou un autre citoyen d’un de vos 4 pays hôtes, est-ce que vous intervenez ?

Généralement les malentendus ne se posent pas entre un malien et un sénégalais en tant que deux personnes de nationalités différentes. Ceux sont plutôt des petites querelles entre êtres humains. Le malien ne se sent pas comme malien ici au Sénégal, il se sent chez lui. Je peux tout de même vous assurer que depuis que je suis ici, l’ambassade n’a jamais eu à intervenir entre un malien et un sénégalais du fait de leurs différentes nationalités. Ce sont des problèmes de la vie quotidienne qui les opposent. Mais ces problèmes sont toujours résolus à l’amiable comme dans la société traditionnelle.

Avez-vous rencontré des difficultés personnelles dans votre carrière ?

Des difficultés ? (rires) vous savez la gestion des hommes n’est pas une tâche aisée. Mis à part les multiples requêtes des compatriotes, qui demandent souvent des services un peu difficiles à satisfaire, ou même non satisfaisables, je n’ai pas rencontré de majeures difficultés. En tout cas pas que je m’en souvienne.

Que pensez-vous du projet de création des Etats Unis d’Afrique ?

C’est une très bonne initiative mais ce n’est pas une question qui date d’aujourd’hui. Depuis bien longtemps, des leaders africains comme Kouamé KOUROUMA, Modibo KEITA ont prôné la réalisation de l’unité africaine. Je ne dirai pas que c’est un idéal, mais c’est une nécessité. Il faudrait que les africains s’y mettent dès maintenant. Et je vous rappelle que le Mali, dans toutes ses constitutions, a prévu une disposition qui certifie qu’il est prêt à céder une partie de son territoire pour la réalisation des Etats Unis d’Afrique. Je crois d’ailleurs qu’il n’y a pas d’autre alternative pour l’Afrique que la création de cette nation. Face aux grandes puissances comme les Etats Unis, la Chine, l’Union Européenne et tant d’autres, l’Afrique n’a comme choix que d’aller vers une unification. Aucun pays africain, seul, ne pourra faire face aux grandes puissances. Or nous sommes dans un monde impitoyable. Seul le regroupement pourra nous sauver parce que ces grandes puissances n’hésiteront pas à nous écraser pour leurs intérêts. Même les pays dits émergents n’ont pas pu se passer de l’union, alors ce n’est pas l’Afrique qui le pourra.

Une fois ce projet réalisé, pensez-vous que les ambassades auront leur raison d’être ?

Les ambassades ont pour rôle de développer les relations de bon voisinage et de coopération ainsi que la sécurité de leurs ressortissants. Mais si toutefois les pays africains arrivent à avoir les mêmes intérêts, je crois que les ambassades n’auront plus à faire grand-chose. Par ailleurs, la diplomatie survivra parce qu’elle ne se limite pas qu’aux ambassades. Elle est également économique, parlementaire, sécuritaire, et transversale. (SIC) Les diplomates pourront ainsi relier l’Afrique à d’autres continents. Mais en dépit de l’unité de l’Afrique, nous ne pourrons pas nous passer de la diplomatie.

Avez-vous des privilèges grâce à votre titre de diplomate ?

En dehors de la convention de Viennes nous n’avons pas de privilèges particuliers. Cette convention porte essentiellement sur des immunités de juridiction et une exonération sur les droits de douane.

Regrettez-vous votre choix d’être diplomate ?

(Un peu égaré avant de répondre) Je ne regrette aucunement mon choix. C’est un travail très émouvant, exaltant et surtout fascinant. Il n’est pas donné à tout le monde la chance de représenter sa patrie et de défendre les intérêts de ses compatriotes. Je n’ai pas choisi d’être diplomate mais je suis très heureux d’avoir embrassé ce métier.

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