Nature

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Belle

lundi 26 avril 2010

Awa DIOUF

La petite ménagère de la famille GNING.

Elle est la première à se réveiller et quelques fois, la dernière à se coucher. Son quotidien est une besogne continue que même une femme de 25 ans aurait du mal à supporter. Cette adolescente est la seule personne à adosser tous les travaux ménagers d’une famille de 11 personnes.

A peine 6 heures du matin, un écho de coups de balais remplace le chant du coq dans ce foyer. Awa s’affaire à assainir la devanture de la concession. Dans la cours cimentée, des bouts de mouchoirs à usages uniques, des sachets en plastique, des grains de sable transportés du dehors par les chaussures, des morceaux de pains et d’os provenant du diner de la nuit précédente. Bref, un vrai fatras. La jeune fille de 15 ans doit se dépêcher de déblayer ce grand espace avant le réveil de ses occupants habituels.
Coiffée de nattes dont on arrive à peine à différencier les lignes, tant elles sont sales et vieilles, Awa est habillée d’un petit T-shirt de couleur rose ternie et d’une culotte Jeans bleue délavée. « C’est ainsi que je suis vêtue chaque matin puisque je n’ai pas assez d’habits et que je ne peux pas utiliser le peu que j’ai pour travailler » dit la fillette avec un air mélancolique. Elle se munit alors d’un autre balai un peu plus fin que celui qu’elle a utilisé pour l’extérieur de la maison. Dos courbé, tête et narines exposées à la poussière, elle fait des va-et-vient harmonieux de gauche à droite, depuis le fond de la cour jusqu’au portail. Elle ne laisse aucune trace de saleté, même pas un grain de sable. Ensuite vient le tour des toilettes. Awa s’équipe de deux seaux d’eau, un balais, un chiffon et une serpillière. Dans le premier seau, elle a mélangé un liquide détergent “Madar“ à de l’eau de javel “Ariel“ et de l’eau simple. Cette solution lui sert à frotter les parois des deux toilettes. L’eau simple contenue dans le deuxième seau sert au rinçage, après quoi, Awa essuie, successivement avec le chiffon et la serpillière, les murs qui brillent aux grands éclats tant ils ont été bien nettoyés. Tout au long de ce labeur, la petite ménagère ne porte ni gans ni autres moyens de protection contre les infections microbiennes auxquelles elle est passible.
Enfin se réveille un premier membre de la famille, c’est la première fille de la patronne de petite bonne. C’est Fifi, elle appelle Awa pour qu’elle aille chercher du pain. Il est 7 heures passées de 38 minutes. A son retour, Awa chauffe de l’eau pour le bain de Fifi, pendant que cette dernière prend son petit déjeuner. Et c’est ainsi pour tous les membres de la famille.
Vers 10 heures, Awa part faire le marché juste à moins de 100 mètres de son lieu de travail. C’est le marché de la Gueule Tapée. Après l’achat des condiments du repas de midi, elle vient cuisiner tout en se faisant superviser par l’une des ses petites patronnes (les filles de sa patronne). Après le déjeuner, elle fait la vaisselle et apporte le reste de leur plat à sa mère qui est pileuse à la Médina. « Si je ne lui apporte pas à manger, elle sera obligée de payer pour elle et mes quatre petites sœurs qui l’aident souvent à piler » confie Awa. Elle se dépêche de revenir dans la famille GNING pour avoir une heure de pause, de 15 heures à 16 heures.
L’après midi est aussi chargé que le matin. Après la prière de 16 heures, elle nettoie une deuxième fois la cour et prépare le dîner. Comme à l’accoutumée, après chaque repas elle fait la vaisselle. Après ces deux grands travaux et les petites commissions qui y sont entremêlées, elle se douche vers 21 heures et va directement au lit.
Pendant que celles qui font le même travail qu’elle gagnent entre 40 000 et 50 000 FCFA, Awa, à cause de son jeune âge, ne gagne que 25 000 FCFA par mois. « Je me contente de ce salaire en attendant de grandir et imposer le mien » murmure la petite. Son salaire est alors un autre petit moyen de survie pour sa famille, en plus du peu que gagne sa mère, et celui de son père qui fait de l’agriculture dans leur village natal.
Contrairement à beaucoup d’adolescents de son âge, Awa ne veut pas aller à l’école. Elle veut devenir une grande commerçante. « On peut bel et bien devenir riche sans pour autant avoir été à l’école. Avant que l’école n’apparaisse, n’y avait-il pas de riches ? » m’interroge-t-elle.
En attendant de grandir, elle va économiser autant qu’elle peut pour avoir un fonds de commerce.

1 commentaire:

  1. Bonjour Mlle,

    Cet homme dont tu parles a aussi beaucoup d'admiration pour toi. Pour ton honnêteté intellectuelle. Pour ta simplicité. Tôt ou tard, tu en seras recompensée incha ALLAH.

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